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Les Universités sont-elles des entreprises comme les autres ? (suite)

Laurent Batsch, Président de Paris-Dauphine, répond aux questions de Dominique Souchier sur France Culture ce 19 avril. Le site de l'émission précise que "admise à la Conférence des grandes écoles, Dauphine est-elle encore une Université ? - Les grandes entreprises ont-elles pris les commandes de Dauphine ? - L'Université pourrait-elle encore faire des économies ?"

Le transfert des coûts de l'Etat vers les étudiants et employeurs des diplômés

Le Président de cette université prend le contrepied du discours pratiqué par d'autres présidents d'universités. En effet, beaucoup ont geint cet automne et cet hiver auprès du Ministère de l'Enseignement Supérieur au sujet de leurs budgets insuffisants. Des présidents et présidentes qui ont souvent évité de s'en prendre à eux-même, et notamment à leur manque de lucidité et à leur absence de courage de décisions.

Le Président de Dauphine postule au contraire que les moyens attribués aux universités par l'Etat sont insuffisants pour faire fonctionner et développer son université, et que son rôle est de trouver des voies de fonctionnement différentes. Il tient notamment le discours que le consentement à payer par les étudiants ou les familles pour des études doit évoluer en France. C'est aussi un discours tenu aussi par le Président de la Conférence des Grandes Ecoles (CGE), la CGE qui vient d'ailleurs d'admettre en son sein l'université de Paris-Dauphine.

Les modèles économiques de la formation initiale, continue et en ligne

Dans cette demie heure d'interview, le Président de Paris-Dauphine évoque aussi la mise en ligne des supports de cours. Il commet cependant l'analyse partiale et habituelle du modèle économique des MOOCs en ne distinguant pas le coût de constitution d'un MOOC ou d'une plate-forme, du coût de leur usage. De plus, M. Batsch comme tant d'autres, oublie que le modèle économique des enseignements "classiques" en présentiel en université coûtent des investissements et induisent des coûts d'exploitation. Si on prend aussi en compte l'efficacité de la formation, par exemple en ramenant le coût au nombre d'étudiants inscrits ou au nombre d'étudiants diplômés, la formation en ligne peut être compétitive. Ce qui transparaît dans une intervention de Rémi Bachelet, auteur du MOOC Gestion de Projet à Centrale Lille, diffusée en cours d'émission. Il sera d'ailleurs intéressant de voir si et comment Centrale Lille fera fructifier ou non cette initiative MOOC pour sa formation initiale ou continue.

D'autant que, comme le Nouvel Economiste le publie le 17 avril, l'enseignement supérieur s'est égaré avec la formation continue. Du moins, telle que les universités et des écoles d'ingénieurs l'ont pratiquée en se positionnant mal dans un milieu très fréquenté et concurrentiel, avec des catalogues ordinaires tant sur la forme que sur le fond. Par exemple, la formation continue de l'université Henri Poincaré de Nancy, puis intégrée dans Nancy-Université, puis devenue celle de l'université de Lorraine a perduré avec un équilibre financier inexistant. L'Ecole Supérieure des Sciences et Technologies de l'Ingénieur de Nancy de cette même université a ainsi récemment voulu renouer avec un âge d'or révolu de sa formation continue. Au lieu de constituer une source de revenus venant abonder des budgets en baisse, la formation continue a un peu plus obéré les subsides de ces établissements. Et ce d'autant plus que les entreprises clientes achètent avec beaucoup de savoir-faire leurs formations continues, quand elles ne les produisent pas elles-mêmes.

On est loin dans ce cas des chaires de mécénat ou de la croissance des coûts de scolarité qui sont une part du modèle économique de l'université de Paris-Dauphine. On est également loin d'une évaluation réaliste du modèle économique de la formation (initiale et continue) en ligne notamment par les MOOCs. On est également loin des Masters pratiqués en école d'ingénieurs, Masters pudiquement réservés aux étudiants étrangers, aux coûts de scolarité censés être des coûts totaux répercutés sur l'étudiant, qu'il soit ou non aidé par une bourse ou une entreprise. Une tendance haussière qui percolera vers les étudiants français : voir par exemple l'augmentation de 850 à 1850 € des droits de scolarité d'écoles de l'Institut Mines Telecom.

Le président d'université devient un président d'entreprise moyenne

Bref être un président d'université est de plus en plus un président d'entreprise comme les autres, à la différence près que sa charge exécutive est importante. Mais l'université française sait-elle choisir et recruter correctement y compris son dirigeant ?

arnaud delebarre

20 avril 2014

Tag(s) : #Universités, #CGE, #MOOC, #Société, #Entreprise
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