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F. Boudjahlat a tancé la suppression des options non sélectives dans l'enseignement secondaire français allant contre l'envie d'apprendre ces matières. Une autre étape vient d'être franchie avec l'instauration de propositions d'études aux recalés de la sélection en Master.* L'écart entre moyens en baisse et populations croissantes d'élèves ou d'étudiants et la dictature de la gestion imposent donc que l'université choisit ses étudiants et les études de ses étudiants, et non les étudiants leurs études. Les oripeaux de la professionnalisation et de l'orientation suggérée supplantent la liberté de choisir ses études et le mérite d'y réussir

Liberté des études versus professionnalisation et orientations imposées

La liberté de choisir ses études est donc obérée par deux facteurs : (1) l'invitation ferme à choisir des filières qui conduisent à un métier, et (2) l'obligation de choisir ses études parmi des orientations. En ce qui concerne, le premier argument, on peut arguer que la qualité et la durée de vie des analyses prospectives sur les métiers prometteurs sont souvent médiocres. Combien de conseils d'administration d'établissements d'enseignement accueillent des acteurs économiques pour orienter les programmes d'études vers tels ou tels métiers, et telles ou telles "compétences" qui seraient plus professionnalisantes que d'autres. Souvent ces parties prenantes ont une longueur de vue calquée sur celle de leurs services ou sociétés, c'est-à-dire courte et insuffisante pour que le jeune débouche sur un marché d'offres en nombre quand il sera diplômé ou qu'il puisse faire une partie de sa carrière dans les métiers visés. Quant aux orientations proposées, après le portail Admission Post Bac capable de vous orienter même contre votre gré, l'élève ou l'étudiant devraient choisir parmi des orientations choisies par d'autres sur des arguments qui vont de l'existence de places libres (si il y a des places libres dans une filière ne serait-ce pas parce qu'elle est peu demandée parce que peu valorisable ?), à celui de proximité avec son domicile, sans oublier évidemment les orientations prometteuses en emplois et adaptées aux capacités et voeux de l'étudiant. On peut se souvenir de S. Jobs racontant aux diplômés de Stanford comment il a cessé des études pour ne pas ruiner ses parents et s'est inscrit en calligraphie, pour voir les limites du choix d'études pour professionnalisation !

Qui choisit les études ?

T. Mandon a déclaré que la sélection n'est plus un gros mot. Et l'employabilité et l'orientation imposée ne sont plus non plus des gros mots. Il n'y a qu'à lire quelques commentaires à l'article du Monde sur la rentrée en psychologie à l'université Jean Jaurès pour voir combien la liberté de choisir ses études est morte : ils comparent des nombres d'étudiants en niveau 1 de licence à des nombres d'emplois disponibles une fois diplômés à BAC+3 et BAC+5. Le plaisir d'apprendre est souvent bafoué par l'exigence de prérequis ou par la sélection dans certaines études. Il l'est maintenant aussi par des critères de professionnalisation ou d'orientations imposées. Pour le plus grand bien de l'apprenant qui est incapable de bien choisir lui même ! "Faut-il faire un business plan pour choisir ses études ?" répondait qu'il est assez sage de ne pas en faire, mais de choisir des études à sa portée financière, par goût et pour le plaisir qu'elles donneront. Avec les réformes actuelles, il est encore plus inutile de le faire puisque d'autres choisiront pour l'étudiant. Pour finir, quelques mots de J. Zay rappelés par F. Boudjahlat, réconciliant liberté et méritocratie. "Que chacun puisse aller dans la direction choisie aussi loin et aussi haut que ses aptitudes le lui permettront".

arnaud delebarre

13 octobre 2016

*Le recteur doit faire au moins trois propositions d’admission au diplômé de Licence recalé, en accord avec les chefs d’établissements concernés, en tenant compte de l’offre de formation, des capacités d’accueil, du projet professionnel de l’étudiant, de l’établissement dont il vient, et des prérequis des formations.

Tag(s) : #APB, Enseignants, Etudiants, Liberté, Orientation, Sélection, Université,
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