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Un certain W. Munter* prétend que les "scientifiques comme ceux du GIEC [...] ne sont pas crédibles. Ils mentent pour préserver des intérêts économiques dont les leurs. Car il y a tout un business derrière la lutte contre le réchauffement". Pourtant, beaucoup de décideurs préfèrent au contraire le business as usual et confortent leurs décisions sur d'éventuelles solutions technologiques qui n'existent pas. A titre d'exemple, TOTAL et son PDG ont entonné un hymne à la gloire du gaz à la Climate Week en comptant sur le stockage du CO2. Les décideurs sont donc souvent plus fossilisés que leur énergie ou insensibles à une catastrophe qu'ils ne vivront pas. En conséquence, pour faire bouger les lignes, le GIEC vient de s'adresser aux décideurs sur la faisabilité d'un réchauffement climatique autour de 1,5°C tel qu'escompté par la COP21.

Un rapport spécial avait en effet été commandé par la COP21 (l’accord de Paris de la 21e «Conference Of Parties») au GIEC. Il vient ainsi de publier un rapport pour les décideurs où il compare les impacts d’un réchauffement limité à 1,5°C au lieu de 2°C et sur les moyens d’y parvenir. On constate que le GIEC pense que 1,5°C c’est moins pire que 2°C, ce dont on se doutait un peu. Plus intéressantes sont les considérations sur les moyens d’atteindre un réchauffement limité, une réduction des émissions de CO2 et sur la capture et/ou le retrait du CO2 de l’atmosphère. Le lecteur trouvera ci-dessous** une traduction, légèrement adaptée, en français des quatre séries de conclusions principales de ce rapport.

On peut retenir parmi elles trois conclusions particulièrement fortes de ce rapport pour les décideurs où l'on peut voir la différence entre ce qu'il conviendrait de faire et notre train d'émissions :

- (1) Les activités humaines ont provoqué un réchauffement de la planète d'environ 1,0 °C par rapport aux niveaux préindustriels, avec une fourchette probable de 0,8 °C à 1,2 °C. Le réchauffement planétaire devrait atteindre 1,5 °C entre 2030 et 2052 s'il continue à ce rythme (conclusion A1 page 4/33 et Figure 6/33).

- (2) les voies d’un réchauffement climatique limité à 1,5 °C prévoient le retrait [ou élimination après capture] de dioxyde de carbone (CDR=Carbon Dioxide Removal) de l'ordre de 100 à 1000 GtCO2 (Gt=Gigatonne) au cours du 21ème siècle [actuellement, on émet annuellement environ 40 Gt de CO2 – cf. Figure b de la Figure page 6/33 du rapport]. Le retrait serait utilisé pour compenser les émissions résiduelles et, dans la plupart des cas, obtenir des émissions négatives nettes afin de ramener le réchauffement planétaire à 1,5 °C après un pic (conclusion C3 page 23/33).

- (3) les contributions nationales des parties de l'Accord de Paris, entraîneraient des émissions mondiales de gaz à effet de serre en 2030 de 52 à 58 GtCO2eq par an. Ces ambitions ne limiteraient pas le réchauffement climatique à 1,5 °C, même si elles étaient complétées par des augmentations très difficiles d'ampleur et d'ambition des réductions d'émissions après 2030. Il ne sera possible d'éviter le dépassement et le déploiement à grande échelle de l'élimination du dioxyde de carbone (CDR) que si les émissions mondiales de CO2 diminuent bien avant 2030 (conclusion D1 page 24/33).

arnaud delebarre

16 octobre 2018

*Des Chamoniards se transmettent depuis quelques temps une interview de 2014 d'un certain W. Munter, qui serait un spécialiste des avalanches, qui prétend que l'homme n'est pour rien dans le réchauffement climatique et notamment par sa contribution à l'enrichissement du CO2 de l'atmosphère. En revanche, il est plus discret pour expliquer ce réchauffement (qu'il admet) : "Je n’ai pas de réponse car trop de facteurs entrent en jeu. Par contre, j’ai des hypothèses. Je soupçonne par exemple les variations de l’intensité du rayonnement solaire – qui répondent à des cycles – de jouer un rôle central". W. Munter dont les arguments ont déjà été démontés plusieurs fois, devrait prendre connaissance notamment de la corrélation qui existe entre la montée des températures (depuis qu'on les mesure) et les émissions cumulées de CO2 et des moyennes glissantes qui sont faites sur 132 mois pour montrer l'impact, hors "cycles" solaires

** Les 4 groupes de conclusions du résumé du rapport du GIEC d'octobre 2018 à l'attention des "policymakers" traduites en français et légèrement adaptées :

A. Comprendre le réchauffement climatique de 1,5 °C

On estime que les activités humaines ont provoqué un réchauffement de la planète d'environ 1,0 °C par rapport aux niveaux préindustriels, avec une fourchette probable de 0,8 °C à 1,2 °C. Le réchauffement planétaire devrait atteindre 1,5 °C entre 2030 et 2052 s'il continue à ce rythme.

Le réchauffement provoqué par les émissions anthropiques de la période préindustrielle à nos jours persistera pendant des siècles, voire des millénaires, et continuera d’entraîner de nouveaux changements à long terme du système climatique, tels que l’élévation du niveau de la mer, avec des impacts associés.

Les risques liés au climat pour les systèmes naturels et humains sont plus élevés pour un réchauffement planétaire de 1,5 °C qu’aujourd’hui, mais inférieurs à 2 °C. Ces risques dépendent de l’ampleur et du taux de réchauffement, de la localisation géographique, des niveaux de développement et de vulnérabilité, ainsi que des choix et de la mise en œuvre des options d’adaptation et d’atténuation.

B. Changements climatiques prévus, impacts potentiels et risques associés

Les modèles climatiques prévoient des différences robustes dans les caractéristiques climatiques régionales entre le réchauffement actuel et le réchauffement planétaire de 1,5 °C et entre 1,5 °C et 2 °C. Ces différences incluent les augmentations de : la température moyenne dans la plupart des régions terrestres et océaniques, des températures extrêmes dans la plupart des régions habitées, de fortes précipitations dans plusieurs régions et la probabilité de sécheresse et un déficit de précipitations dans certaines régions.

D'ici 2100, l'élévation moyenne du niveau de la mer à l'échelle mondiale devrait être inférieure d'environ 0,1 mètre, avec un réchauffement de 1,5 °C par rapport à 2 °C. Le niveau de la mer continuera à monter bien au-delà de 2100. L'ampleur et le taux de cette augmentation dépendent des futures voies d'émission.

Sur terre, les impacts sur la biodiversité et les écosystèmes, y compris la perte et l'extinction d'espèces, devraient être inférieurs à un réchauffement de la planète de 1,5 °C par rapport à 2 °C. En limitant le réchauffement climatique à 1,5 °C par rapport à 2 °C, il est prévu de réduire les impacts sur les écosystèmes terrestres, d'eau douce et côtiers et de conserver davantage de services rendus à l'homme.

Limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C par rapport à 2 °C devrait réduire les augmentations de la température de l'océan, ainsi que l'augmentation correspondante de l'acidité de l'océan et la diminution du niveau d'oxygène dans l'océan. En conséquence, la limitation du réchauffement climatique à 1,5 °C devrait réduire les risques pour la biodiversité marine, les pêcheries et les écosystèmes, ainsi que leurs fonctions et services pour l'homme, comme l'illustrent les récents changements apportés aux écosystèmes de récifs coralliens de glace arctique et d'eaux chaudes.

Les risques liés au climat pour la santé, les moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, l'approvisionnement en eau, la sécurité humaine et la croissance économique devraient augmenter avec le réchauffement climatique de 1,5 °C et augmenter à nouveau de 2 °C.

La plupart des besoins d'adaptation seront moins importants pour un réchauffement de la planète de 1,5 °C par rapport à 2 °C. Il existe un large éventail d'options d'adaptation permettant de réduire les risques de changement climatique. L'adaptation et la capacité d'adaptation de certains systèmes humains et naturels sont limitées à un réchauffement planétaire de 1,5 °C, avec des pertes associées. Le nombre et la disponibilité des options d’adaptation varient selon les secteurs.

C. Voies compatibles avec un réchauffement planétaire de 1,5°C

Dans les voies modélisées avec un dépassement limité à 1,5 °C, les émissions mondiales nettes de CO2 anthropiques diminuent d’environ 45% par rapport aux niveaux de 2010 d’ici 2030 pour atteindre zéro autour de 2050. Pour limiter le réchauffement climatique à moins de 2 °C, les émissions de CO2 devraient diminuer d’environ 20% d’ici 2030 sur la plupart des voies de pénétration et atteindre un zéro net vers 2075.

Les voies limitant le réchauffement planétaire à 1,5 °C nécessiteraient des transitions rapides et profondes en énergie, terre, ville et infrastructures (y compris les transports et les bâtiments), et systèmes industriels. Ces transitions de systèmes sont sans précédent en termes d'échelle, mais pas nécessairement en termes de rapidité, et impliquent des réductions d'émissions importantes dans tous les secteurs, un vaste portefeuille d'options d'atténuation et une augmentation significative des investissements dans ces options.

Toutes les voies qui limitent le réchauffement climatique à 1,5 °C prévoient le retrait [ou élimination après capture] de dioxyde de carbone (CDR=Carbon Dioxide Removal) de l'ordre de 100 à 1000 GtCO2 au cours du 21ème siècle. Le retrait serait utilisé pour compenser les émissions résiduelles et, dans la plupart des cas, obtenir des émissions négatives nettes afin de ramener le réchauffement planétaire à 1,5 °C après un pic. Le déploiement du retrait du CO2 de plusieurs centaines de GtCO2 est soumis à de multiples contraintes de faisabilité et de durabilité. Des réductions d'émissions importantes à court terme et des mesures visant à réduire la demande en énergie et en terres peuvent limiter le déploiement du retrait à quelques centaines de GtCO2 sans recourir à la bioénergie avec captage et stockage du carbone (BECCS).

D. Renforcement de la riposte mondiale dans le contexte du développement durable et des efforts pour éliminer la pauvreté

Les estimations des effets sur les émissions au niveau mondial des ambitions d'atténuation énoncées au niveau national, telles que présentées dans l'Accord de Paris, entraîneraient des émissions mondiales de gaz à effet de serre en 2030 de 52 à 58 GtCO2eq par an. Les voies reflétant ces ambitions ne limiteraient pas le réchauffement climatique à 1,5 °C, même si elles étaient complétées par des augmentations très difficiles de l'ampleur et de l'ambition des réductions d'émissions après 2030. Il ne sera possible d'éviter le dépassement et le déploiement futur à grande échelle de l'élimination du dioxyde de carbone (CDR) que si les émissions mondiales de CO2 commencent à diminuer bien avant 2030.

Les impacts évités du changement climatique sur le développement durable, l'éradication de la pauvreté et la réduction des inégalités seraient plus importants si le réchauffement de la planète était limité à 1,5 °C au lieu de 2 °C, si les synergies d'atténuation et d'adaptation étaient maximisées tout en minimisant les compromis.

Les options d’adaptation spécifiques aux contextes nationaux, si elles sont soigneusement sélectionnées et assorties de conditions propices, auront des avantages pour le développement durable et la réduction de la pauvreté avec le réchauffement planétaire de 1,5 °C, bien que des compromis soient possibles.

Les options d'atténuation compatibles avec les trajectoires à 1,5 °C sont associées à de multiples synergies et compromis entre les objectifs de développement durable. Bien que le nombre total de synergies possibles dépasse le nombre de compromis, leur effet net dépendra du rythme et de l'ampleur des changements, de la composition du portefeuille d'atténuation et de la gestion de la transition.

Limiter les risques liés au réchauffement planétaire de 1,5 °C dans le contexte du développement durable et de l'éradication de la pauvreté implique des transitions qui peuvent être rendues possibles par une augmentation des investissements dans l'adaptation et l'atténuation, des instruments politiques, l'accélération de l'innovation technologique et des changements de comportement.

Le développement durable soutient et permet souvent les transitions et transformations fondamentales de la société et des systèmes permettant de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C. Ces changements facilitent la recherche de voies de développement résilientes au changement climatique qui permettent d'atteindre des objectifs ambitieux d'atténuation et d'adaptation parallèlement à l'éradication de la pauvreté et aux efforts visant à réduire les inégalités.

Le renforcement des capacités d'action sur le climat des autorités nationales et sous-nationales, de la société civile, du secteur privé, des peuples autochtones et des communautés locales peut soutenir la mise en œuvre d'actions ambitieuses impliquées en limitant le réchauffement climatique à 1,5 °C. La coopération internationale peut créer un environnement propice à la réalisation de cet objectif dans tous les pays et pour tous les peuples, dans le contexte du développement durable. La coopération internationale est un catalyseur essentiel pour les pays en développement et les régions vulnérables.

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